ALOÏNE AU ROYAUME D’AGRION…

Bonjour « rêve magique », où vas-tu me conduire par cette nuit étoilée. Connaîs-tu par hasard, un endroit dans lequel, avec toi, je ne serais pas encore allée m’extasier. Dépêche-toi, depuis ce matin que je suis éveillée, j’ai la nostalgie de mes beaux songes dorés.

La maman d’Aloïne venait juste de refermer la porte de la chambre de sa petite fille derrière elle. C’était toujours avec beaucoup de tendresse que chaque soir, elle bordait et embrassait son enfant qu’elle aimait.

Débordée de travail, elle devait ce surplus, aux cigognes qui passaient souvent par sa maison pour y déposer de gracieux petits poupons. Aussi, la douce maman dont le cœur débordait d’amour pour ses enfants, ne se rendait pas compte que son aînée devenait en grandissant, la plus solitaire des enfants de la terre. Absorbée par trop occupations, elle n’avait plus que des regards chargés de douceur à poser sur Aloïne dont elle imaginait qu’elle poussait dans la tendre insouciance de l’enfance…

Sous son apparence calme et tranquille, Aloïne petit poisson solitaire, nageait habilement dans l’immensité de son océan de mystères. Ainsi, toutes les nuits elle partait en voyage à cheval sur le dos d’une étoile, pour aller en secret, apaiser sa nostalgie dans le beau royaume d’amour d’où elle était née un jour et que les adultes délaissaient pour devenir les esclaves des richesses de la terre.

Personne si ce n’est son petit copain, qu’elle appelait « le p’tit coquin » et qui avait surgi un matin, du lointain pays de son monde intérieur, n’avait droit aux récits de ses escapades en dehors du temps. D’ailleurs, si elle les lui racontait, c’était parce qu’elle était certaine qu’il n’en parlerait pas aux grands. Aloïne accordait sa confiance sans méfiance au p’tit coquin, parce qu’elle savait que jamais il ne la trahirait.

– « Tant pis pour eux » lui disait-elle en riant « ils n’avaient qu’à pas jeter au panier la simplicité des enfants ».

Ainsi, à chaque aurore qui se levait, le p’tit coquin se nettoyait les oreilles à merveille pour ne pas perdre une bouchée des histoires que lui contait, la petite fée des étoiles.

– « Quelle était la couleur du temps cette nuit ? demandait le p’tit Coquin à Aloïne. Sur quelle étoile as-tu voyagé ? Dis-moi, as-tu croisé des comètes ? Est-ce qu’un jour tu m’emmèneras avec toi dans le sillage mystérieux des nuages, pour jouer avec ton petit chien « Image »…

– Malade, Image était parti par un triste matin d’hiver. Dehors, les ombres se reflétaient sur la glace qui émergeait de la terre. Les talons qui y marchaient, glissaient et s’y dérobaient sans arrêt. Toi Aloïne… tu pleurais, car il était parti trop tôt, victime d’une impardonnable négligence. Maintenant, il jappe tout content dans le bel univers dont tu me parles tant ».

En écoutant à son tour le p’tit Coquin, les beaux yeux couleur de jade d’Aloïne s’animaient soudainement :

– « Mon traîneau qui volait vers Image, était une étoile filante toute brillante. Dans le ciel, les comètes m’indiquaient le chemin, se détournant pour contempler le faste de mon attelage que tiraient les Elfes du temps. Alors, mon lumineux météore, pour les remercier de leur politesse, lançait des poignées de paillettes dont les étincelles embrasaient le ciel. Quant à la couleur du temps, elle avait une tonalité toute légère. Le vent qui soufflait délicatement m’entraînait au travers d’une mer musicale aux flots de cristal. Du lointain s’échappait en abondance une lumière extraordinaire ».

Et voilà le p’tit coquin, dont les oreilles étaient nettoyées à merveille, qui se frottait très fort les yeux pour mieux voir l’histoire qu’elle lui racontait. Aloïne parlait, contait et racontait au p’tit coquin.

– « Quand tu iras dans ce monde où tout est beau, tu verras comme chacun s’y dévoue avec enthousiasme… Les puces qui sautent sur Image ne grattent pas ; elles ont des antennes qui le réveillent à chaque fois qu’il doit préparer l’arrivée de petits enfants venus s’y refaire une santé. Là-bas, les guêpes, comme toutes les guêpes, ont des aiguillons ; pourtant Image s’y frotte béatement le museau, car il sait que leur piqûre est une énergie qui émet des caresses extraordinaires. Le travail dans ce bel univers, ne ressemble pas à celui qui épuise les gens de la terre. Des araignées aux pattes démesurées et velues, tissent à longueur de temps des coussins en dentelle d’amour, pour que les personnes âgées puissent doucement y poser leurs pieds fatigués.

– En arrivant dans le domaine d’Agrion, poursuivait Aloïne, on ne peut ignorer qu’il est le seul endroit où la simplicité, y est largement cultivée. C’est pour cette raison que tu n’y verras jamais les hommes voter pour supprimer les frontières. Chacune est un niveau de conscience dans lesquels chaque être a le loisir de pénétrer pour aller y puiser ce qui lui sera le mieux adapté. Et ce qui est hallucinant, c’est que tout ce monde œuvre au cœur d’un havre de lumière extraordinaire qui régénère…

La douce maman d’Aloïne s’épuisait en courant après le temps qui s’enfuyait si bien qu’elle avait fini par prendre en grippe son rythme trop court, qui lui tenait tête.

– Ne dis jamais à ma maman que là-haut, le temps demeure éternellement au présent, recommandait Aloïne au p’tit coquin.

– Les jours, les mois, les années ne sont que des points de repère, indispensables aux hommes de la terre. Dans le monde d’amour, personne n’a jamais vu l’aube encore endormie, sortir de son lit en s’étirant au petit jour. Tout comme la nuit qui jamais ne viendra étendre son voile gris sur le firmament. Là-haut, le temps ne s’appelle pas « trop court » ; il répond au doux nom « d’Infini ».

– Et Infini baigne dans un savoureux halo de lumière extraordinaire.

Sur le visage d’Aloïne qui s’extasiait, le p’tit coquin pouvait lire combien elle vivait intensément ce qu’elle contait. Aussi, il s’accrochait au regard de la petite fille pour ne pas perdre de vue un instant, l’odyssée vers laquelle elle le transportait.

– « Dans ce royaume où tout est beau, personne ne se bat jalousement pour prendre la tête du gouvernement, car un être merveilleux en a la gestion depuis la nuit des temps. Son nom est « Agrion »…

– Quand cela lui est nécessaire, Agrion déploie en un instant des ailes extraordinaires qui lui permettent d’atteindre à la vitesse des éclairs, chaque parcelle de vie dont est composée la création. Il est le roi de l’univers et le papa de tous les enfants de la terre. Son château n’est pas construit avec des pierres usées par les caprices du temps. C’est un halo d’amour et de lumière extraordinaire qui régénère.

Sois attentif p’tit coquin, car quand tu atteindras le seuil des portes du domaine d’Agrion, tu sauras avec certitude qui est réellement « le Maître » des lieux !!!

Est-il homme, force ou lumière !!!

Pour les gens de la terre, c’est encore un mystère. Alors, quand tu émergeras du dernier flot de cristal de la mer musicale, tu comprendras qu’Agrion est le régent d’un palais magnifique et que sa force d’amour se transmute en lumière. Seule la pureté des enfants peut en saisir le mystère…

Pourtant, il y a deux mille ans de cela, il avait envoyé le plus aimant de tous ses enfants. Mais les gens ont fait souffrir, ce doux médiateur envoyé par le père. Depuis tout ce temps, la maman de l’enfant qui est « Reine d’Amour » dans le bel univers, pleure pour les hommes de la terre.

Le beau regard d’Aloïne, qui vivait plus que jamais ce qu’elle contait, se voilait en rentrant tristement du lointain pays de son imaginaire. Le p’tit coquin, curieux, courait derrière elle, lui criant à perdre haleine :

– « Aloïne, Aloïne, j’ai envie d’entendre la suite du voyage ».

Alors, la petite fée des étoiles, repartait par les routes des nuages, bravant la tourmente pour lui relater la troublante féerie qu’interprétaient nos mythiques génies des eaux…

– « De la mer s’élevaient les « Ondines » qui, dans des danses légères, recevaient quelques larmes amères qui tombaient du ciel. Les « Sirènes » en cortège, récupéraient sur les flots les délicates graines de nacre que les pleurs de la Reine d’Amour y déversaient ; tandis qu’aux fins fonds des océans, les coquillages s’ouvraient pour recueillir les perles salées que l’insouciance des hommes de la terre n’en finissait pas de ciseler…

Malgré ça, depuis des siècles et des siècles, cette douce maman, élue « Miss Univers » offre son cœur pour sauver les hommes de la terre. Mais… ceux-ci semblent choisir de rester ignorants, refusant tout contact avec les vertueux missionnaires qu’elle ne cesse de leur envoyer…

Par un lointain matin sorti de la nuit des temps, « Maître Respect » avait été le premier à faire son entrée sur la terre. Agrion lui avait légué tous pouvoirs pour éveiller les consciences afin qu’elles découvrent les égards et la courtoisie.

« Miss Simplicité » et ses demoiselles d’honneur, y avaient été nommées conseillères afin d’enseigner les bonnes manières. Studieuses, elles déposaient çà et là, quelques touches de charme et de poésie… Les petites mains de l’univers leur confectionnèrent de romantiques toilettes en voile de modestie, agrémentées de rubans d’innocence afin de faire redécouvrir aux gens de la terre, la simplicité enfantine qu’ils avaient délaissée…

L’incertaine destinée des hommes allait, le pensait-on, s’améliorer avec tous ces Maîtres de la perfection, faisant tour à tour leur apparition sur la divine terre que rénovait Agrion.

Sur les deux hémisphères, Agrion et Miss Univers engendraient un monde de compréhension afin que l’amour voie le jour… Mais au centre de la terre, un être satanique surveillait d’un œil pervers, ce fabuleux défilé de qualités avec manifestement à ses côtés, les flammes de l’hypocrisie qui se pourléchaient, excitant sa jalousie.

Aloïne continuait de raconter tristement au p’tit coquin, le récit du désordre qui régnait malgré tout sur la sphère.

– « Pendant ce temps, l’être à l’œil pervers se réjouissait de la crédulité des hommes. Pour arriver à ses fins, il avait mis son bel habit d’apparat, lamentablement cousu avec du fil de jalousies et de mensonges. Et, pour ne pas manquer son entrée sur la terre, il avait utilisé, la naïveté des hommes qu’il était en train de duper. En un rien de temps, il avait réussi à les convaincre de croire que le bel habit d’apparat qu’il leur exhibait, était cousu de fil d’or ».

Agrion, peiné de voir ses enfants se perdre par manque de discernement, leur a donné la possibilité de choisir entre l’amour et la haine. Ceux-ci ne l’ont pas écouté et Miss Univers, qui assistait à la manifeste dégringolade que leur choix provoquait, souffrait en voyant les populations attiser le feu pour entretenir les guerres entre les nations…

Et la terre se dégradait sous le regard de « l’œil pervers » qui ricanait, se délectant de satisfaction ».

Aloïne, qui avait manifesté le désir de rentrer, n’arrêtait plus maintenant de raconter le désastre dans lequel se complaisait l’humanité. A ses côtés, le p’tit coquin regrettait sa trop grande curiosité…

Trop tard, la petite fille qui ne savait s’exprimer qu’avec passion, ne pouvait dissimuler sa peine. Désenchanté, le p’tit coquin demandait à Agrion d’orienter à nouveau la petite fée des étoiles vers la route des nuages… Ses efforts restèrent vains puisque le papa de tous les enfants de la terre n’avait pas, ce soir-là, attelé le lumineux traîneau d’Aloïne.

– « Agrion distribue à chacun de ses enfants un amour sans limite, mais en convoitant les richesses que l’œil pervers déploie pour exciter leur ego, beaucoup ont perdu le regard qu’ils avaient sur leur émotionnel… » disait Aloïne.

Le p’tit coquin qui s’épuisait face à l’atroce réalité, implorait Aloïne pour qu’elle sorte de sa ténébreuse épopée.

– « Je t’en supplie, abandonne à leur sort les hommes de la terre. Un jour, ils passeront, eux aussi, le dernier flot de cristal de la mer musicale pour atteindre le halo de lumière du château d’Agrion » disait Aloïne.

Subitement, la petite fille s’était mise à raconter des choses auxquelles le p’tit coquin ne s’attendait pas, mais sur lesquelles, il convenait d’accorder une attention toute particulière.

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